Elucid, media indépendant revivifiant, invite ici l’ancien haut fonctionnaire Paul-Antoine MARTIN à présenter son dernier roman (que l’auteur définit comme un « récit fictionnel dans lequel tous les faits sont absolument justes » ).
Paul-Antoine MARTIN nous invite à la compréhension de la psychologie d’une caste de hauts fonctionnaires qui aurait accaparé à son seul profit la République qu’elle est supposée servir et à laquelle elle doit jusqu’à son existance. Ces « serviteurs de l’état » seraient coupables d’une « trahison » (qui ne saurait être qu’aussi ‘haute’ qu’ils le sont eux-mêmes comme fonctionnaires) qui se traduirait dans le constat qu’ils « détruisent la France » .
Le clan des seigneurs – Immersion dans la caste d’état
Paul-Antoine MARTIN
Editions Max Milo – 2023
256 pages | ISBN : 9782315010455
21,90 €
Cette caste oligarchique y apparaît comme un parasite de la République et de la nation. La métaphore biologique se justifie ici par le fait que le parasite dépend existentiellement de son hôte et, contrairement au symbionte, l’exploite sans contrepartie. Ce parasite serait ici létal puisqu’il est dit « détruire » son hôte ; « la France » .
Retenons quelques traits marquants du profil décrit :
- irresponsabilité, fruit d’une totale immunité ( « privilège exorbitant » ), impunité collectivement garantie. Irresponsabilité comme maladie auto-immune donc, pour filer la métaphore biologique.
- absence d’éthique, de sens de la nation et des intérêts collectifs autres que ceux de la caste
- égoïsme de caste, carriérisme
- mensonge, manipulation, supercherie, usurpation ; « tout est dans le costard »
- absence générale de profondeur, imbus d’eux-mêmes et méprisant l’étranger de caste
- incapacité intrinsèque à assumer les missions confiées par la République
- culpabilité de fait lourde dans le « désastre » national
Cette caste est définie par l’auteur comme appartenant à trois corps issus de trois moules : l’un administratif, l’ENA (Ecole Nationale de l’Administration, produisant des ‘énarques’), les autres ‘techniques’, au choix parmi Polytechnique/Ponts/Mines. Ces ‘oligarques’ qui détiendraient tous les rouages du pouvoir administratif seraient quelques milliers en France.
Portant quant à nous notre attention sur la « justice », nous nous interrogeons sur la pertinence de cette description socio-psychologique pour la compréhension d’un corps d’état non ici nommé, composé de dix-mille fonctionnaires détenant eux aussi tous les rouages d’un bien réel pouvoir. Ce corps est celui de la magistrature, issue pour l’essentiel du ‘moule’ de l’ENM (Ecole Nationale de la Magistrature, produisant des magistrats).
Une magistrature qui conteste haut et fort toute réalité d’un « entre-soi » qui lui serait parfois reproché. Et pourtant…
Nous invitons le lecteur à suivre l’intéressant entretien proposé par Elucid en ayant à l’esprit ce corps absent du discours. Si certes l’expérience de Paul-Antoine MARTIN nous offre une description d’une oligarchie d’état qui n’inclut en rien explicitement le corps de la magistrature, elle pourrait néanmoins nous permettre de mieux comprendre cette face cachée de l’oligarchie.
lien Elucid (dont graphiques de l’entretien)
Bien entendu, ce corps, celui de la magistrature dont ne parle pas Paul-Antoine MARTIN, est à observer du point de vue de ses nombreuses et essentielles spécificités statutaires dans la République.
Mais en écho à une défiance populaire croissante que nul ne conteste, les dénonciations de ces élites se multiplient, souvent avec la préoccupation de parvenir à comprendre d’un point de vue sociologique ou psychologique la déviance constatée. Nous en proposons quelques expressions par les liens ci-dessous.
Parmi celles-là, pour autre exemple, autre ancien haut fonctionnaire, Éric VERHAEGHE, fondateur du Courrier des Stratèges. Il est bien question ici de profil-type de quelque haut fonctionnaire de la magistrature.
Notons que dans l’une et l’autre intervention on en vient à se référer aux fondateurs de notre république, aux sources mêmes de la refondation post-vichiste.
Le « récit fictionnel » de Paul-Antoine MARTIN nous aide à appréhender certains rouages psychologiques de l’auto-définition d’une caste – concept lui-même assez intuitif.
Le concept d’oligarchie prête quant à lui davantage à confusion.
Qu’est ce qui distingue ce « pouvoir d’un petit nombre » du concept de démocratie (représentative notamment) ?
Prenons la question par l’exemple, par les catégories communément intuitées. Apparaissent alors deux ‘images’ communes de l’oligarchie :
- L’oligarchie d’argent ; celle de quelques milliardaires se partageant, à l’instar de ces ‘oligarques’ russes ou ukrainiens dont on entend si souvent parler, les rouages du pouvoir – politique, administratif, judiciaire et médiatique. Ceux-là font les présidents, possèdent les medias,…
- L’oligarchie de caste ; oligarchie d’état si celle d’une caste de fonctionnaires, oligarchie médiatique si celle d’une caste de ‘communiquants’,…
Bien entendu, la réalité de l’illégitime accaparation du pouvoir est multiforme. Pour illustration, par ces temps de pantouflage généralisé, de mécénat bienheureux ; la difficulté de classer l’oligarchie de firme – dont chacun ressent l’oppressante réalité – dans l’une ou l’autre catégorie ci-dessus.
Il apparaît déjà clairement que l’oligarchie est la forme naturelle de la démocratie représentative quand l’exigence démocratique n’est plus qu’un cache-sexe.
A ce stade, comment se représenter une éventuelle oligarchie de robe qui serait celle d’une caste de magistrats ? Eu égard aux essentielles spécificités déjà évoquées, une nouvelle catégorie intuitive d’oligarchie se présente parmi les lauréats ; une forme d’oligarchie statutaire dont on a des exemples à travers les systèmes théocratiques.
De fait se présentent à nous des exemples de républiques théocratiques qui pourraient nous aider à mieux appréhender, peut-être, ce que l’on appelle parfois « la république des juges » .
lien media : Laurent Mauduit dans Mr Mondialisation, “Une Caste dissout l’État de l’intérieur au profit des intérêts privés”
lien media : Laurent Mauduit dans Le Media, « La caste, main basse sur l’état »
lien media : Société Louise Michel : « La caste, cette haute fonction publique qui a pris le pouvoir »
lien media : Hervé Kempf : « L’oligarchie ça suffit, vive la démocratie »
lien media : Sophie Coignard et Romain Gubert sur FranceInfo : « L’oligarchie des incapables »
lien media : Sophie Coignard et Romain Gubert : « La caste cannibale »
lien media : Jacques Généreux pour Elucid, « La connerie a pris le pouvoir ! Comprendre le cerveau de nos ‘élites’ »
lien media : Emmanuel Todd, « Après la démocratie : l’oligarchie et son État-prédateur »
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